Virton dit NON aux visites domiciliaires et Virton dit OUI à une commune hospitalière
Ce jeudi 8 mars 2018, le Conseil communal de Virton a approuvé à l’unanimité et une abstention, après amendement, la motion déposée par les conseillers Annie Goffin (Ecolo) et Philippe Legros (PS)!
« Logeurs ». Mot un peu désuet qui refait irruption dans notre langage quotidien pour désigner ces milliers de citoyens désintéressés qui se mobilisent pour l’accueil des réfugiés à domicile à l’initiative de la Plate-forme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés. Une nuit, un jour, un week-end. Un repas, une tablée, une cantine. À 200 mètres, 20 km ou 200 km. Oui, jusqu’à Virton!
Un projet de loi du gouvernement MR-NVA-VLD-CD&V en discussion à la Chambre vise à permettre des « visites domiciliaires » (= entrer chez les gens) chez des logeurs, par exemple pour contrôler les personnes qui s’y trouveraient, en l’occurrence des réfugiés.
Annie Goffin pour ECOLO et Philippe Legros pour le PS ont déposé un projet de motion contre les visites domiciliaires, à discuter lors du Conseil communal de ce jeudi 8 mars 2018. En effet, s’agissant potentiellement de domiciles de paisibles citoyens virtonnais, la commune est directement concernée et peut exprimer son refus de voir de telles pratiques mises en œuvre sur son territoire.
Le projet de motion a été amendé en séance (amendements en italique) et se termine par les engagements suivants :
Le Conseil communal de Virton:
INVITE le Parlement fédéral à rejeter tel quel le projet de loi en question ;
INVITE le Gouvernement fédéral à reconsidérer sa position au regard des différents avis émis jusqu’à présent par le Conseil d’État, l’ordre des avocats, l’association syndicale de la magistrature et les différentes associations citoyennes (CNCD, Ligue des droits de l’Homme, Ciré…) ;
CHARGE M. Le Bourgmestre de transmettre cette motion à M. Le Président de la Chambre, aux différents chefs de groupes parlementaires, à M. Le Premier Ministre, à M. Le Ministre de l’Intérieur et à M. Le Ministre de la Justice ;
DÉCLARE Virton « Commune Hospitalière ».
Ces engagements sont introduits par les considérants suivants :
Motion du Conseil Communal de Virton concernant le projet de loi autorisant les visites domiciliaires
Considérant le fait que la Commission de l’intérieur de la Chambre a examiné ce mardi 23 janvier 2018 le projet de loi qui autorise les visites domiciliaires en vue d’arrêter une personne en séjour illégal ;
Considérant le fait que la loi offre déjà aux forces de sécurité tout le loisir d’intervenir et de contrôler toute personne susceptible de nuire à l’ordre public ;
Considérant que le projet de loi vise à modifier la loi de telle sorte que les juges d’instruction soient placés dans la quasi obligation de permettre ces visites domiciliaires ;
Considérant que le domicile est inviolable selon l’article 15 de la Constitution, que les exceptions à l’inviolabilité du domicile sont les plus strictes et que le juge d’instruction n’ordonne une perquisition que dans le cadre d’une infraction ou d’une instruction pénale et non d’une procédure administrative ;
Considérant que l’article 22 de la Constitution garantit à chacun le droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi ;
Considérant que l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme proclame dans son §1 le droit de toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance et organise dans son §2 un régime de restrictions si celles-ci sont « prévues par la loi » et « nécessaires, dans une société démocratique » ;
Considérant que la Cour constitutionnelle, dans son récent arrêt 148/2017 du 21 décembre 2017 censure certaines dispositions de la loi pot-pourri II, et annule précisément la possibilité de procéder à une perquisition via une mini instruction en ces termes :
« En raison de la gravité de l’ingérence dans le droit au respect de la vie privée et dans le droit à l’inviolabilité du domicile, la Cour décide que la perquisition ne peut, en l’état actuel du droit de la procédure pénale, être autorisée que dans le cadre d’une instruction. Permettre la perquisition via la mini-instruction dans le cadre de l’information sans prévoir des garanties supplémentaires pour protéger les droits de la défense viole le droit au respect de la vie privée et le droit à l’inviolabilité du domicile » ;
Considérant que ce raisonnement s’applique a fortiori dans le cadre d’une procédure administrative ;
Considérant que le projet de loi stigmatise les personnes en situation de séjour illégal en supprimant les droits de la défense les plus fondamentaux et en assimilant une procédure administrative à une procédure pénale ;
Considérant que le droit au respect de la vie privée et le droit à l’inviolabilité du domicile sont des principes fondamentaux qui remontent à la paix de Fexhe, et que Virton a toujours été une terre de liberté, de résistance et de démocratie ;
Une occasion que le Conseil communal tout entier (ou presque) a saisi pour que l’accueil gaumais ne soit pas un vain mot !